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C'est quand même bien, pour une fille !
23 janvier 2008

31 _ retard girl, makes us sick..

P1260040

Il y a quelques années, il y avait le vide. Le vide était taché par mon sang, qui sortait de mon nez. Il sortait, rouge, épais, gluant, visqueux, et j'avais l'impression que mon cerveau fuyait par ces narines laides. Des caillots s'échappaient. Et le goût venait jusque dans ma gorge, il venait se mêler à ma nourriture, à mon tabac. Ma salive était sanglante. Il coulait partout ; sur les tables, dans les rues, sur le béton, sur le sable, dans l'eau ; il coulait en voyage, dans les trains, dans les bus, dans les métros, et les gens autour de moi se hâtaient. Au début, je bougeais, usant des mouchoirs par dizaines, et ce petit morceau de coton spécial, que la mère allait chercher à la pharmacie, ses talons fins et courts claquant sur le sol. Mes mains remuaient, se hâtant de moins en moins ; et les gens autour de moi. Qui se hâtaient. Et les larmes coulaient sur mes joues comme de la sueur, je les sentais qui coulaient, brûlantes et rapides, et les gens autour de moi criaient, et je devais leur expliquer que je ne pleurais pas pour le sang perdu, que je ne pleurais pas parce que quelqu'un m'avait donné un coup de poing dans la gueule, et ils ne me croyaient pas. Ils couraient, me prenaient par le bras, m'accompagnaient aux toilettes, me parlaient, et ils voulaient que je leur réponde, mais j'oubliais de leur répondre ; mes lèvres tremblaient. Je vomissais et je saignais. Le vomi se mêlait au sang. S'ils avaient vu cela, tous ces gens aimables et attentionnés, insupportablement gentils, emplis de pitié, ils auraient tourné le dos avec frayeur et dégoût. Mais, Dieu, j'étais enfermée à double tour, incapable de sortir moi-même. Je grossissais, maigrissais, grossissais, maigrissais. Quelque chose de vibrant, de palpable, de honteux, de brûlant. Et j'essuyais les saletés avec du Sopalin, tout ce Sopalin qui absorbait les textures grisantes. Et par-dessus ma gorge irritée, il y avait la fumée qui cramait, que j'avalais sans bonheur, qui s'enfonçait dans le néant, qui m'écrasait sans hâte. Et ce pchit, ce pchit familier, qui couvrait le tout comme un couvercle, qui me faisait inhaler une odeur de violette et de muguet, une odeur qui me donnait envie de mourir.



Et parallèlement, je pensais à autre chose. Précisément, aux autres. J'ai imaginé ce que ç'aurait été de sauter dans cette Seine, de sentir mon corps se faire engloutir par ces eaux verdâtres, impitoyablement naturelles, lourdes et immondes, d'avaler cette eau, de la sentir m'emplir et m'étouffer, puis de perdre ma conscience, de sentir si fort le manque d'oxygène, au milieu de toute cette puanteur suave et dégueulasse.

Que les nerfs cessent de vibrer, que le coeur cesse de palpiter, et que le sang se fige, les vaisseaux calmes et secs, les yeux grands ouverts. Que le vide, le vide, il n'est jamais parti, et qu'il reste là comme une insolence dégoûtante, et que les pulpes laissent sortir leur pus, jus de poison. La solitude.

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